Compte-rendu traversée Christian Gathier

Participants : Hans, Tanguy, Jim, Jean-Pierre, (Pat pour les reconnaissances et Rita en équipe de soutien)


 

 

Tout a commencé en juillet 2005. Cet été-là, nous étions 3 membres des STALACS (Hans, Jim et Zit) à participer au camp du STYX dans les Pyrénées, l’objectif principal étant la Pierre Saint Martin, occasion unique pour un petit club comme le nôtre de faire cette traversée mythique.
Après la traversée, nous devions rejoindre les autres Stalacs dans le Vercors pour le camp d’été du club. Yvan, du STYX, nous parla alors d’une nouvelle traversée possible dans la région de notre gîte et nous montra le N° 50 de la revue « SPELEO » qui donnait les détails de « LA traversée du Vercors : le réseau Christian Gathier ».
Dès notre arrivée à Autrans où nous avions notre gîte, nous en avons discuté avec le reste du groupe et la première reconnaissance fut organisée.

Grâce au GPS de Hans, les scialets de Brudour et du Toboggan furent rapidement localisés. Ces deux accès au réseau sont proches l’un de l’autre et permettent d’atteindre, après un réseau fossile, l’amont de la rivière de Bournette. Quelques mètres avant un plan d’eau siphonnant, un petit passage vers le haut permet d’atteindre le Passage Clé qui donne accès à la grande salle des Ténèbres.
La troisième entrée, le Trou des Anciens, fut par contre plus difficile à localiser. Les coordonnées indiquées dans la revue SPELEO étant fausses, nous avons cherché des heures ce fameux trou. Par chance, nous sommes tombés sur un groupe spéléo qui prospectait le massif et qui nous a renseigné sur la vraie position.
Ce jour-là, nous avons arrêté notre reconnaissance après avoir rempli nos bottes en bas du Passage Clé en passant par les scialets de Brudour et du Toboggan. Le premier nous a semblé plus praticable que le second, (plutôt étroit en diaclase verticale) et nous l’avons choisi comme point d’entrée à venir.
Le trou des Anciens ne fut pas exploré, mais c’était suffisant pour nous mettre l’eau à la bouche et lors de notre AG en février 2006, il fut décidé que ce serait le second objectif du club pour l’année, après le camp en Sardaigne du mois de mai.(Présidente, quel club !)
C’est ainsi que fin juillet nous nous retrouvions à 5 pour tenter l’aventure, plus Rita qui allait assurer la logistique nourriture de manière magistrale comme d’habitude.
Encore merci Rita.

Samedi 28 juillet 2006

J’ai râlé un peu hier en installant ma tente sous la pluie (Depuis le camping dans les marécages de Savoie j’avais juré qu’on ne m’aurait plus !). Aujourd’hui il fait sec et le moral est revenu.
L’objectif du jour est de pousser une reconnaissance au-delà du Passage Clé entrevu l’année précédente. Il faut savoir que la traversée se fait en principe du trou des Anciens vers le scialet de Brudour, avec rappel de corde ; donc pas question de faire demi-tour, d’où l’importance des reconnaissances.
Nous sommes quatre: Pat et Tanguy qui découvrent plus Hans et moi qui connaissons une partie. Dès que nous atteignons la rivière de Bournette, nous constatons avec plaisir que la pollution annoncée (6000 litres de fuel en janvier dans la rivière supérieure) est très faible et ne remet pas en question notre traversée Au Passage Clé, Patrick et Tanguy s’arrêtent tandis qu’à deux nous poussons une pointe pour trouver la continuation.

 

Après quelques contorsions et ramping dans des passages bas, nous débouchons dans la grande salle des Ténèbres (120x50x40m). C’est dans cette salle que nous devrons aboutir via une trémie lors de notre traversée. Allez donc retrouver une trémie dans une salle grande comme un terrain de foot et remplie sur des mètres de hauteur de blocs tombés du plafond ou des parois affaissées ! La trémie débouchait quelque part vers le fond de la salle, légèrement sur la gauche, mais où ? On s’est donc mis tous les deux à inspecter chaque trou, chaque éboulis laissant entrevoir un passage vers le bas, tout en longeant la paroi gauche. Et ce qui devait arriver arrivât : au détour d’un bloc j’ai aperçu un catadioptre comme celui qui marquait la direction du passage clé et que nous avions trouvé en arrivant dans la salle. Content de ma trouvaille, j’ai crié après Hans qui crapahutait un peu plus loin. Hélas, notre joie fut de courte durée : à force de longer la paroi de gauche, j’avais fait le tour de la salle et j’étais revenu à mon point de départ. Nous en sommes resté là pour cette sortie car Tanguy et Patrick nous attendaient à l’autre bout du passage clé.
Ce soir là, Jean-Pierre nous rejoint après avoir déposé son épouse à Beaune. C’est l’occasion de boire une Leffe supplémentaire à l’apéro du soir.

Dimanche 29 juillet 2006

Le lendemain, nous sommes quatre pour reconnaître le trou des Anciens, Pat ayant décidé de glander à la piscine.
L’équipement du P48 d’entrée avec ses deux fractionnés et un déviateur se fait sans problème, si ce n’est un frottement important de la corde juste sous le deuxième amarrage en place (il sera éliminé par un bout de tuyau « emprunté » au camp). Dès que tout le monde est en bas, nous nous élançons (en rampant) dans le méandre de la Gentille Fée. Nous avions tous vu la topo et lu la description, mais personne ne s’était attardé sur ce méandre « d’une centaine de mètres », surtout avec un nom aussi aguichant. En fait de gentille fée, il s’agit plutôt d’un méchant diable : étroit, fort sinueux, un peu en bas, un peu en haut… bref nous sommes tous en nage après ce 100m quand nous débouchons, dans la belle galerie Père et Fils. Il nous faut encore parcourir quelques galeries et équiper deux puits avant d’atteindre la Gare de Triage, terminus de notre reconnaissance.Au retour, l’équipement du P48 est laissé en place pour gagner du temps lors de la vraie traversée.
Le soir au camp, une Leffe à la main (il faut bien se réhydrater!), il est décidé que le lendemain sera un jour de relâche avant l’effort. Comme il restait un soupçon d’inquiétude sur le parcours entre la sortie de la rivière de Montué et la salle des Ténèbres, Jean-Pierre se propose pour une ultime reconnaissance au-delà du passage clé, pour trouver la fameuse « jonction » que les découvreurs du réseau ont eux-mêmes tant cherchée.

Lundi 30 juillet 2006

Ce jour-là nous sommes donc deux au Km 31 de la D76 pour descendre encore une fois dans Brudour. Si c’était la première fois pour Jean-Pierre, c’était la troisième pour moi et en une heure nous étions au passage clé, bottes pleines comme d’hab.
Arrivés dans la salle des Ténèbres, la jonction est trouvée rapidement : elle est en fait marquée par un cairn que nous avons loupé avec Hans. Par quelques petites galeries nous arrivons assez vite dans la Galerie Géante. Ainsi nommée pour ses dimensions spectaculaires, cette salle remontante n’est en principe pas parcourue lors du cheminement « classique » : un laminoir qui démarre en hauteur sur la gauche, dans le bas de la salle. Habitués aux laminoirs « belge », nous cherchions un petit trou de 50 cm de haut et large de deux ou trois mètres. C’est ainsi que nous sommes remontés presque jusqu’en haut de la salle avant de redescendre et de voir en face de nous un superbe laminoir de 80 cm de haut et large de 10m !
Au bout du laminoir, un R7 équipé nous amène dans la salle de la Cascade. L’objectif étant atteint, nous retournons au camp annoncer la bonne nouvelle aux « touristes ».

Mardi 31 juillet 2006

Ce mardi matin, jour J, tout le monde est en forme et enthousiaste. Après un bon petit déjeuner, la dernière main est mise à la préparation des kits personnels : combi néoprène, sacs étanches, éclairage de réserve, nourriture et boisson, couverture de survie…
Le matériel collectif est réduit au minimum : une C50 de 9mm, une C10, une petite corde de rappel et 4 moustifs, au cas où…, le tout répartit dans les kits personnels.

Après un dernier contact météo et avec une petite heure de retard sur l’horaire prévu (Stalacs oblige!), nous quittons le camp à bord de deux voitures, Pat ayant pour mission d’en amener une à la sortie et de rentrer au camp avec l’autre.
Dans le puits d’entrée, lors de la reconnaissance, Tanguy nous avait arrosés de cailloux gros comme des balles de tennis en passant le fractio à -28m. Nous décidons donc, par prudence, d’attendre l’arrivée en bas du puits avant que le suivant ne s’engage en haut. C’est ainsi que chacun de nous a pu profiter en toute tranquillité du puits des Jouisseuses !
Le 100m méandre de la Gentille Fée nous paraît moins rébarbatif que lors de la reconnaissance et bientôt nous profitons de la belle galerie Père et Fils.
Cette galerie mène à un carrefour à trois départs, suivi d’un petit méandre. Une main courante équipée nous amène au puits de l’Orgasme (P20 – rappel) puis au puits de la Montre en Or (P16 – rappel). C’est Tanguy qui a pris la tête et qui équipe. Je ferme la marche et récupère la corde que je renvoie vers l’avant. Au P6 suivant, Tanguy a la bonne idée (eh oui, ça arrive !) de sortir la corde de réserve de 10m et de faire le rappel avec la cordelette plutôt que d’utiliser la C50. Ca nous oblige à travailler avec deux descendeurs car elle ne passe pas dans le descendeur en double, mais ça fait gagner du temps. Nous utiliserons cette méthode pour tous les puits et ressauts inférieurs à 10m. Une dernière main courante nous amène dans la galerie du Bostrich Masqué, superbe conduite forcée, presque ronde, de 2m de diamètre environ.
On ne sait toujours pas ce qu’est un bostrich !

 

Arrivés à la Gare de Triage, chacun se déshabille pour enfiler sa néoprène et mettre sa polartec au sec. Tanguy n’a qu’une petite néoprène mi-cuisses, mais il a quand même des chaussons néoprène et ses éternelles baskets aux pieds (à quand les bottes ?).
Un petit coup de « mendiant » pour se recharger en calories et nous voilà reparti pour la découverte de la rivière de Montué (+/- 2 km). Rappels et mains-courantes se suivent et s’enchaînent sans problème. Le parcours est assez évident. La topographie des lieux alterne entre parois lisses et sinueuses, juste de quoi passer de face, et parois à la roche déchiqueté, avec des vasques profondes au-dessus desquelles on passe en oppo : un vrai régal.
Les couleurs changent aussi, tantôt la roche est noire, tantôt blanche et certaines parois sont poisseuses de mondmilch.

Plusieurs cascades plus ou moins profondes sont contournées par des vires suivies de rappels. Lors d’un de ces passages Hans a la mauvaise idée de laisser tomber la seule topo que nous avons. Heureusement elle n’est pas emportée par le courant et nous la récupérons imbibée mais lisible. Après quatre heures dans la rivière, nous arrivons à la salle du Vestiaire, où habituellement on quitte sa néoprène. Comme il ne fait quand même pas trop chaud (5°C) et que nous savons qu’il reste un passage mouillant, nous enchaînons directement le P22 pour aboutir dans la salle Diaclase. Là nous attend une vire géniale, très aérienne et sportive, avec des étriers de corde et un changement de paroi, la rivière écumante en-dessous et un dernier P22 pour finir. Vraiment de quoi prendre son pied (ou se prendre les pieds pour un débutant). C’est là que je me dis que notre jeune Simon a peut-être bien fait de rester en Belgique, son expérience spéléo étant encore assez rudimentaire. T’en fais pas Simon, ton tour viendra !
En bas du P22, nous sommes en terrain connu, dans la salle de la Cascade. La sortie se fait sans hésitation grâce à la reconnaissance de la veille. Les quelques morceaux de tape que j’ai laissés en balises sont bons pour le moral : on est déjà passé par là.
Après le bassin du Passage Clé, nous nous rhabillons de sec, sauf Tanguy qui commence à être bleu et qui file tout seul chercher le soleil et la chaleur…
A la sortie, neuf heures après être entrés, on se congratule et on rejoint la voiture qui nous attend (merci Pat).
Le soir au camp, nous engloutissons de grands bols de grosse soupe chaude que nous a concoctée Rita et nous trinquons une bonne bouteille ( le prix d’une paire de bottes ?) de champagne offerte par Tanguy, tout en rêvant déjà à l’objectif de notre prochain camp…